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ARTISTES TRAMEURS-TRAMEUSES
18 décembre 2020

LE SCRIBOUILLE DU TRAMEUR : N° 05-2020 : Mai 2020 : Débordements N°2 : Terrestres, après tout

LE SCRIBOUILLE DU TRAMEUR :  N°4 / 05-2020 :

 Mai 2020 Débordements N°2 : Terrestres, après tout.

Débordements N°2 : Terrestres, après tout

Débordements n°2 : Terrestres, après toutComment sortir de l'écartèlement entre les prédictions catastrophistes et les dénis fervents? Comment inventer des manières de vivre qui soient en même temps des façons de perdurer? Voilà quelques-uns des chantiers qu'ouvre aujourd'hui la question écologique, et auquel le cinéma contribue à sa façon. Comment?

https://www.helloasso.com

Fantomes 2

Débordements N°1 : David Simon et filmer l'espace public, et Débordements N°2 : Terrestres, après tout

Débordements N°2 : Terrestres, après tout - Débordements

Financer la réalisation et l'impression du deuxième numéro de la revue Débordements
Débordements n°2 : Terrestres, après tout

Comment sortir de l’écartèlement entre les prédictions catastrophistes et les dénis fervents ? Comment inventer des manières de vivre qui soient en même temps des façons de perdurer ? Voilà quelques-uns des chantiers qu'ouvre aujourd'hui la question écologique, et auquel le cinéma contribue à sa façon. Comment ? D'abord en constatant, en pointant. En faisant affleurer, d’une part, les traces d’un délabrement terrible dans sa patience même. D’autre part, en exposant la palette des réactions et propositions qui ne cessent de croître suite à ce qu’il faut bien appeler une prise de conscience. De ce point de vue, tous les cinémas peuvent être convoqués, depuis les blockbusters qui déclinent les scénarios de la fin du monde tout en maintenant leur idéal esthétique et économique de dépense somptuaire, jusqu'aux documentaires désargentés relevant ici ou là l’avancée du désert et l’implantation des oasis. On le comprend, interroger le cinéma à l’aune de l’écologie est un projet aussi vaste que flou. Un projet n’admettant que des réponses partielles, et qui trouve après une série d'entretiens publiés sur Débordements (avec Elise Domenach, Jean-Baptiste Fressoz et Hervé Aubron) un développement dans ce second numéro papier : Terrestres, après tout.

Celui-ci s’ouvrira sur un entretien-fleuve mené par Romain Lefebvre et Florent Le Demazel avec Dominique Marchais, le réalisateur du Temps des Grâces ou de Nul homme n’est une île. Traitant d’agriculture, d’un réseau hydrographique ou encore d’expériences collectives soucieuses de penser l'avenir en accord avec le milieu, ses films sont spontanément associés à l’écologie. Mais ce sont des liens plus complexes qui se révèlent au fil de l’échange : revenant sur son travail de recherche et de réflexion ainsi que sur les étapes du tournage et du montage (la recherche du point de vue adéquat, le souci de mêler les échelles et de donner à voir les relations), le cinéaste témoigne ici d’une conception de l’écologie qui consiste avant tout à ne jamais séparer la question de la nature des dimensions politiques et économiques qui en informent l’usage. Si le nom de David Simon s'est glissé dans la discussion, comme pour offrir une douce transition d’un numéro à l’autre, nous n’en serons pas tenus pour responsables.

Les liens entre cinéma et écologie seront ensuite explorés au fil d'une collection d’essais, réflexions singulières autour d’un mouvement cinématographique (les avant-gardes des années 1920), de la démarche d’un·e cinéaste (Kelly Reichardt, James Cameron…) ou d’une thématique transversale (les animaux, les déchets). Les enjeux écologiques tels qu’ils nous apparaissent aujourd’hui peuvent-ils seulement être figurés ? C’est, en sous-main peut-être, la question des relations que nous entretenons avec la nature qui doit se poser. Elles incluent nos représentations de la nature environnante, les transformations que nous lui infligeons à l’ère de l’Anthropocène (ou capitalocène, plantationocène ou chtullucène, selon le dénominatif qu’on lui donnera au fil de ce numéro) ; il y a aussi, en retour, les façons dont la nature nous apparaît, se fait sentir à nous, ne serait-ce qu’à partir de nos corps, notre substance d’êtres terrestres qui lui appartient toujours.

(Avec des contributions de Hervé Aubron, Gabriel Bortzmeyer, Jérémie Brugidou, Olivier Cheval, Jean-Michel Durafour, Jeanne-Bathilde Lacourt, Alice Leroy, Raphaël Nieuwjaer et Jean-Marie Samocki.)

Enfin, une « conversation potentielle » menée par Charlie Hewison entre Emmanuel Lefrant, Frédérique Menant, Olivier Fouchard et Mahine Rouhi permettra d'envisager une écologie des pratiques cinématographiques expérimentales. Ces cinéastes travaillent en argentique et hors de l’industrie, en s'organisant en collectifs ou en laboratoires d’artistes. Ils élaborent ainsi des techniques de développement moins polluantes tout en se réappropriant les moyens de production. À travers leurs démarches laissant le climat, la terre et les éléments agir à la surface même de la pellicule, s’inventent de nouveaux rapports entre le film et le paysage, au-delà de toute question de représentation.

Débordements n°2 : Terrestres, après tout comprendra environ 220 pages, avec des illustrations. Sa parution est prévue pour septembre 2020.

PAGE fb : https://www.facebook.com/revue.debordements

Revue Débordements

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Débordements N°2 : Terrestres, après tout

Débordements n°2 : Terrestres, après toutComment sortir de l'écartèlement entre les prédictions catastrophistes et les dénis fervents? Comment inventer des manières de vivre qui soient en même temps des façons de perdurer? Voilà quelques-uns des chantiers qu'ouvre aujourd'hui la question écologique, et auquel le cinéma contribue à sa façon. Comment?

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Raphaël Nieuwjaer : une revue de cinéma, du web au papier

Raphaël Nieuwjaer est membre de la revue de cinéma en ligne Débordements. Il nous en parle, ainsi que du futur premier numéro papier, en cours de préparation ! Depuis 2012, Raphaël Nieuwjaer s'occupe avec quelques camarades de la revue de cinéma en ligne (critique / recherche / traduction).

https://www.franceculture.fr

 

"REVELER LES TRACES : TERRESTRES APRÈS TOUT" :

9938Ci- dessus : Photogramme du film "TAHOUSSE" de Mahine ROUHI & Olivier FOUCHARD 2001-2006

 

DÉBORDEMENT

("RÉVELLER LES TRACES" / ARTICLE EN COURS DE RÉDACTION PAR CHARLIE HENRICKSON)  : 

 

ARTICLE ORIGINEL EN BROUILLON ORIGINAL AVANT RÉ-ÉCRITURE ET CORRECTIONS DE RÉDACTION (?)

ISSU D'UNE CONVERSATION AVEC CHARLIE H. VIA SKYPE... :

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Comment le cinéma peut-il figurer l’Anthropocène ? Qu’est-ce qu’une image cinématographique « écologique » ? Dans « Ecoaesthetics. A Manifesto for the XXIst Century », Rasheed Araeen entonne qu’un art écologique doit impérativement délaisser le paradigme de la représentation pour se tourner vers des processus de transformation continue. Abandonnons les objets réifiés, gelés qu’on trouve encore dans les musées, implore Araeen, pour permettre l’émergence d’un art qui serait enfin écologique et qui prendra parti aux processus vivants et productifs de la terre.

L’injonction d’Araeen peut sembler impossible pour le cinéma. Car l’image cinématographique, n’est-ce pas une certaine réification ? Enregistrer une image, c’est geler, figer un moment qui sinon ne serait que flux : « Fixer artificiellement les apparences charnelles de l'être c'est l'arracher au fleuve de la durée : l'arrimer à la vie », écrivait Bazin. Pour que l’image puisse se présenter comme écologique dans le sens d’Araeen, il faudrait peut-être qu’elle puisse rendre visible le processus de sa création. Certes, Jacques Rivette disait bien que « tout film est un documentaire sur son propre tournage », mais cela reste dans le domaine du paradigme représentatif. Il faut chercher plutôt du côté des images qui peuvent porter les traces matérielles des processus, des contacts physiques de l’image avec le monde. Car, comme l’écrivent Stephen Rust et Salma Monani dans leur ouvrage de référence Ecocinema Theory and Practice : penser de façon écocritique le cinéma, c’est d’abord comprendre qu’il est culturellement ET matériellement situé [embedded]. Mais aussi parce que cette idée de traces, n’est-ce pas un concept central de cette ère dans laquelle nous nous trouvons, l’Anthropocène ?

Pour trouver ce genre de création cinématographique, peut-être qu’il faut aller voir du côté de la production cinématographique expérimentale, et plus précisément du côté de la production expérimentale argentique et contemporaine, dans les réseaux de laboratoires cinématographiques d’artistes. Cela peut sembler paradoxal premier abord : le cinéma argentique est a priori synonyme de création industrielle, et surtout est-ce qu’un médium « obsolescent » peut-il être l’outil propice à la création d’images qui puissent rendre compte de la pensée écologique, pensée résolument contemporaine ? Cependant, à y regarder de plus près, ce n’est effectivement si paradoxal.

Pas si paradoxal, car comme l’écrivent Yann Beauvais, Patricia Mellencamp et autres, le cinéma expérimental est toujours d’abord et avant tout une pratique. Pas si paradoxal, car comme l’écrit Scott Macdonald – premier à utiliser le terme d’« éco-cinéma » au début des années 2000 – la pellicule cinématographique incarne justement cette lutte entre la permanence et l’éphémère : « nous pouvons l’exposer à la lumière et voir les images qui y sont capturées, mais nous savons que cette lumière qui nous permet de voir la série des images fixes le long de la bande de celluloïd cause l’effacement de celles-ci et, plus encore, que la présentation formelle de cet Art accélère sa destruction inévitable ». Pas si paradoxal, ensuite, car nous le savons depuis Peirce, depuis Bazin et depuis Barthes, la pellicule photographique et cinématographique est d’abord index, c’est-à-dire moyen de créer des signes à partir de traces, d’impressions. Pas si paradoxal, encore, car pour penser une image qui porte les traces de son intégration dans le « maillage » dont parle Timothy Morton, cela demande avant tout une image matérielle, une image physique. Pas si paradoxal, enfin, car les pratiques expérimentales de l’argentique qu’on retrouve dans les réseaux mondiaux de laboratoires autogérés s’inscrivent dans une volonté farouche de sortir des logiques industrielles, et que c’est dans ces lieux que la question de la fabrication alternative et écologique des matériaux se posent.

Si la création dans de nombreux pays de ces laboratoires cinématographiques d’artistes date du début des années 1990 plus ou moins, leurs origines remontent aux débuts du cinéma. Avant l’industrialisation massive du cinéma, les premier.e.s cinéastes devaient s’impliquer dans toutes les étapes de la création de leurs films : tournage, montage, mais aussi développement et tirage. Bien sûr, au fil de l’industrialisation et de la commercialisation du cinéma, les grandes puissances comme Pathé, Eastman-Kodak, et plus tard Fujifilm centralisent la production de pellicule, et installent leurs laboratoires de création et de développement de pellicule argentique partout dans le monde. Rapidement, les pratiques de développement et du tirage ne sont plus le domaine des artistes-cinéastes, mais des laborantins de Kodak, de Fuji et autres. On assiste historiquement ainsi à une scission entre les différentes étapes de production des films : le tournage et le montage réservés aux « artistes », et les autres étapes réservées aux « techniciens », « chimistes » des grands laboratoires. Certes, quelques pratiques, marginales, de développement et de tirage par les artistes eux- et elles-mêmes persistent au fil des années, surtout dans le cinéma amateur, et chez quelques cinéastes célèbres comme Robert Flaherty et Alexandre Medvedkine. Cependant, ce n’est que véritablement à partir des années 1960 et 1970, à l’époque de la création des « coopératives » dans le milieu du cinéma expérimental que cette pratique recommence à faire l’objet d’un usage systématique et organisé chez quelques groupes d’artistes-cinéastes. Citons surtout le London Film-Maker’s Co-op, qui en 1966 crée non seulement une coopérative de distribution et de diffusion de cinéma expérimental, mais aussi un laboratoire géré par les cinéastes eux- et elles-mêmes, suivant la volonté de mettre à disposition commune et partagée les outils de production pour tou.t.e.s celles et ceux qui voudront les utiliser (Malcolm Le Grice, co-fondateur du LFMC proposait par ailleurs aux instances gouvernementales de l’époque de suivre cette exemple aussi sur une échelle plus large : financer les outils de production plutôt que les œuvres individuelles). Au-delà de cette tentative à Londres, en revanche, il faut attendre les années 1990 avant que l’idée se généralise dans d’autres pays du monde.

Ce sera en 1990, à Arnheim aux Pays Bas, que le premier laboratoire indépendant et autogéré d’artistes verra le jour, créé par trois étudiant.e.s de l’Ecole des Beaux-Arts d’Arnheim : Karel Doing, Saskia Fransen et Djana Mileta. Refusant d’accepter que leur école se débarrasse du matériel de production filmique pour faire place au matériel vidéo, les trois camarades de classe décident de créer le Studio één, lieu de développement et de création DIY argentique. Deux ans plus tard ils sont suivis par la création à Hanovre du « Secteur 16 », et de « l’Atelier MTK » à Grenoble, dans le squat « Le 102 ». Très vite en France, MTK se voit débordé de demandes de cinéastes d’utiliser leur labo, et se construit ainsi le réseau « Ebouillanté » en France à partir de 1993, permettant la création de laboratoires d’artistes autogérés partout en France : « Mire » à Nantes, « Burstscratch » à Strasbourg, « Labo de la Belle de Mai » à Marseille, et deux labos en Ile-de-France, « L’Abominable » (d’abord à Asnières, maintenant à La Courneuve) et « L’Etna » (d’abord dans le 3eme arrondissement de Paris, maintenant à Montreuil).

Depuis 2005, il existe un réseau organisé de labos venant d’une vingtaine de pays à travers le monde, Filmlabs, dont on peut voir le site ici : filmlabs.org. On peut lire sur ce site une définition de ces laboratoires comme étant un « territoire d’expérimentation du cinématographique au-delà d’un quelconque ‘genre’ à un moment où l’industrie abandonne peu à peu le support argentique ». Plus largement, ces labos présentent des territoires éminemment fertiles pour penser autrement la création d’images cinématographiques, en réintégrant surtout la matérialité et la chimie comme éléments centraux de la production.

Nous sommes ainsi allé à la rencontre de quatre cinéastes français.es, tou.t.e.s associé.e.s à ces réseaux de labos artisanaux, pour discuter de comment l’on peut penser l’écologie à travers la création argentique. Emmanuel Lefrant est cinéaste expérimental qui vit et travaille à Paris, ainsi que directeur de la structure de distribution du cinéma expérimental Light Cone. Si ses premiers films exploraient surtout les « paysages abstraits » de l’émulsion filmique, ses trois derniers films – Parties visible et invisible d’un ensemble sous tension [2009], Le Pays dévasté [2015] et I don’t think I can see an island [2016, co-réalisé avec Christophe Becks], intègrent davantage de figuration, et portent plus précisément sur des thématiques écologiques. Frédérique Menant est documentariste et cinéaste expérimentale, qui vit et travaille également à Paris. Après des études d’anthropologie, elle s’est orientée vers le cinéma documentaire. Elle fait des films d’abord en numérique, puis se convertit à la création argentique après un atelier de réalisation à Lussas, et le rencontre avec, entre autres, Vincent Sorrel, Pierre Hanau, Catherine Bareau et Philippe Côte. En intégrant l’Etna et l’Abominable, elle y co-fonde avec d’autres cinéastes femmes « La Poudrière », groupe de cinéastes féministes. Ses films les plus récents sont issus de son séjour en Guadeloupe, et expérimentent avec des procédés de développement utilisant des matériaux « naturels » comme le café, ou des fleurs. Enfin, Olivier Fouchard et Mahine Rouhi sont un couple de cinéastes et artistes qui vivent et travaillent près de Grenoble, et ont beaucoup travaillé au sein de l’Atelier MTK. Ils ont créé un grand nombre de films expérimentaux, organiques et subversifs depuis 1999, et sont souvent décrit comme étant des cinéastes « alchimistes », dans la lignée d’autres comme Jurgen Reble et Nicolas Rey.

Les quatres artistes cinéastes travaillent à leur manière la question d’un regard et d’une image « écologiques » dans leurs films respectifs, souvent par ailleurs privilégiant la croisement de paysages naturels et des transformations chimiques et physiques de l’image imprimée sur la pellicule. Avec chacun.e de ces cinéastes, nous avons tenté de réfléchir ensemble à l’Anthropocène, l’écologie des outils matériels qu’ils et elles utilisent, les processus et les traces que l’on peut trouver dans leurs films…


Argentique vs. numérique

Emmanuel

Il y a plusieurs aspects qui m'intéressent dans la création argentique : je trouve d’abord que la question du scintillement, du battement est très intéressante. C'est quelque chose qu'on ne retrouve pas à l'occasion d'une projection numérique. Après, le deuxième aspect, c'est la matière photochimique qui, de mon point de vue, est véritablement une matière vivante, ce que je pense est illustré assez dignement dans Underground [2001] ou Parties visible et invisible d’un ensemble sous tension [2009], et même après, avec Le Pays dévasté [2015] et I don’t think I can see an Island [2016] sur la question du traitement croisé. Le troisième point, qui est essentiel, c'est la question de la matière tangible. Chaque artiste a ses propres outils. Quand j'ai un ruban de pellicule devant moi, c'est comme un sculpteur ou un peintre. J'ai vraiment impression d'avoir une surface, un monde des possibles qui s'ouvre et d'avoir la possibilité, avec mes mains et avec le toucher, de pouvoir avoir une action sur l'image que je vais générer à travers le film que je vais faire. C'est vraiment ce rapport tactile à la matière qui m'intéresse.

L’image numérique, si tu regardes les choses de près et de manière franche, c’est le résultat d’un calcul. C’est une accumulation de zéros et de uns, qui définissent comment le pixel de haut à gauche va se comporter et de quel couleur va être celui du bas à droite. Là, on est sur un rapport complètement différent, c’est vraiment un rapport de matière à matière. Comment la lumière agit sur des sels d’argent…

Frédérique

En filmant, j’ai toujours cherché quelque chose au-delà du figuré. Quelque chose de l’ordre de la présence au monde. Être là, quelque part, filmer autant d’où je regarde que ce que je regarde, en quête d’un paysage mental plutôt que d’une captation de la réalité.

 J’ai le sentiment que le numérique m’éloigne physiquement du monde. L’argentique me ramène à une matérialité de l’image qui provoque quelque chose d’un autre ordre. Il est question d’incarnation.  J’ai la sensation que les lieux et les personnes que je filme « descendent » dans l’image. S’y incarne d’une autre manière, persistante. S’inscrivent dans une alchimie de la lumière. J’ai l’idée que les photons en transformant physiquement la matière, transfèrent quelque chose de la réalité physique vers l’image. 

Sur l’image elle-même, même quand mes films sont figuratifs et documentaires, l’émulsion est une matière qui est plus proche de la peinture que le scintillement numérique. 

 

Olivier

Ce qui est intéressant dans ce cinéma argentique, c’est qu’on n’est pas prolétarisé. Quand t’es devant un ordinateur, quand t’es devant un téléphone, tu ne sais pas comment il marche, et encore moins comment le réparer. Quand t’es devant un DCP et ça tombe en panne, tu ne peux faire autre chose que de passer un coup de fil à la maintenance. Autrefois le projectionniste non seulement faisait la maintenance de sa machine, la réparait, commander les pièces et pouvait les poser, mais pouvait aussi démonter et remonter la machine, comme un horloger avec une horloge. C’est intéressant parce que c’est le contraire de la prolétarisation.

Emmanuel

Hollywood a décidé d’imposer des formats de salle qui sont des DCP. Ce qu’il faut comprendre c’est que sur la chaîne argentique, t’as la fabrication de la pellicule, ensuite le filmage en tant que tel – les cinéastes qui filment avec leur Bolex etc. –, ensuite les labos qui font des copies, le son, le tirage etc, et puis ensuite la distribution dans les salles. Dès lors que tu coupes un élément de la chaîne, tout s’effondre. Hollywood a décidé de couper la diffusion, c’est-à-dire qu’on vire tous les projecteurs, on fout tout à la poubelle et on remplace par des projecteurs numériques, qu’on va vendre au monde entier et on va se faire un fric pas possible, et économiser en shipping et tout ça. Mais en faisant ça ils ont tué les labos, ils ont tué Kodak, ils ont tué tout le monde. Alors, pour l’instant Kodak survit, mais survit difficilement. Le jour où Kodak arrête de faire de la pellicule, qui peut faire du film argentique ? Plus personne ! C’est très compliqué en réalité d’avoir un ruban plastique qui fait 16mm de largeur précisément, où les perforations sont au quart de millimètre près au bon endroit, où la couche sensible photochimique est couchée au bon endroit et régulière. C’est des procédés industriels que tu ne peux pas réaliser comme ça.

Olivier

Il y a toujours eu ce souci chez MTK, et chez les gens du réseau l’Ebouillanté, de prendre de l’autonomie par rapport à l’industrie, de fabriquer ses propres chimies etc. Le jour qu’on ne fabriquera plus de pellicule, ils trouveront des moyens.

Ce qui est subversif dans le cinéma qu’on fait, c’est qu’on dit aux gens : c’est facile, vous pouvez le faire vous-mêmes. Tout le monde peut peindre comme Michel-Ange ou Van Gogh, tout le monde peut filmer comme Cassavetes ou Kubrick. On n’est Cassavetes ou Van Gogh qu’une fois, mais ce n’est pas quelque chose d’inaccessible. Ça c’est extrêmement subversif, parce que le marché de l’art contemporain, le délire d’Hollywood, du festival de Cannes et les trucs comme ça, c’est dire aux gens « ce n’est pas pour vous, ces gens-là sont exceptionnellement doués, ils sont géniaux, ils vous dépasseront toujours d’une tête ». Ce qu’on faisait avec le cinéma expérimental, c’est dire aux gens : c’est possible. La beauté est possible, elle est accessible, vous pouvez y aller quand vous voulez, il suffit d’y passer un peu de temps et vous pourriez y arriver tous.

 

Une écologie des outils…

 

Olivier

Le cinéma avait d’abord été expérimental et artisanal. Puis c’est devenu industriel et extrêmement violent, forcément. 24 images par secondes c’est la rafale, et c’est la rafale de la société industrielle, du capitalisme, du néolibéralisme.

J’ai tendance à considérer le cinéma plutôt comme une activité frivole, mais c’est assez violent quand même. Il faut de l’énergie, il faut polluer de l’eau, il faut de l’électricité… C’est une transformation du feu. Le feu à évolué. Le feu on l’a découvert, puis avec la poudre et puis le nucléaire : on a une évolution spectaculaire depuis le Néolithique. L’écologie, c’est aussi ça.

Je sais que faire des films c’est chier dans la colle, parce qu’on pollue de l’eau. En même temps j’avais tendance à me donner bonne conscience en me disant que Gaumont, Pathé, Kodak, tout ça, pour imprimer des pubs de cacahuètes, de barres chocolatées, et puis des bandes annonces de publicitaires – qu’on projetait en 35mm dans les salles à l’époque – j’avais fait le calcul : ils avaient pollué plus d’eau que nous ne pollueraient jamais. C’était me donner bonne conscience.

La question écologique se pose, donc, parce qu’on pollue l’eau, mais aussi parce que quand on regarde les choses en face : c’est quoi de la pellicule ? C’est de l’émulsion, qui est faite à base de gélatine de mouton. Il y avait donc des troupeaux de moutons, et à chaque fois qu’ils avaient une commande importante de pellicule ils faisaient une Treblinka, c’était un massacre ! Régulièrement, une fois que le cinéma est vraiment devenu une industrie, ils massacraient des moutons à tour de bras.

Ensuite, le triacétate, le support du cinéma, c’est quoi ? A l’origine, c’est du bois, c’est de la fibre de cellulose, comme pour faire du papier. Donc tu te rends compte que pour en faire un support translucide ou transparent, il faut vraiment dégueulasser beaucoup de flotte quoi. On dégueulasse l’eau, on tue des moutons, puis après on utilise des chimies dégueulasse pour le développement…

Frédérique

Filmer aujourd’hui en pellicule dans le cadre d’une autonomie des moyens de productions comme nous le faisons dans les labos autogérés implique sans cesse une lutte contre le gaspillage et l’obsolescence programmée de la haute technologie. 

Bien sûr le film implique des éléments polluants, la gélatine de l’émulsion est d’origine animale, le support est un dérivé plastique, les chimies sont polluantes… Mais je ne pense vraiment pas que les composantes des caméras numériques, des disques durs de stockage, etc. le soient moins au final... 

Emmanuel

Toute production d’image génère de la pollution. Alors évidemment, ça nous saute aux yeux que la pellicule, vu qu’il faut utiliser des produits chimiques qui sont des produits toxiques, vu que la pellicule elle-même repose sur du polyester ou de l’acétate, du plastique non-recyclable… D’autant plus qu’on y accole une matière chimique dessus donc c’est encore moins recyclable. Mais quelqu’un qui travaille en numérique, est-ce qu’il pollue moins ? Ça a l’air moins évident, on se dit que c’est plus clean avec l’iPhone, mais en réalité on sait très bien que ce n’est pas vrai. Il y a encore des choses qui sont cachées et qui ne sont pas révélées au grand public. On sait très bien que les batteries génèrent de la pollution hallucinante, que tous les métaux rares qui sont contenus dans les caméras des téléphones c’est des extractions dans des mines. Sans parler de l’éthique : les enfants qui y travaillent, l’exploitation des pays pauvres, toutes ces matières premières qu’on va chercher en Afrique… Donc je soupçonne que de faire du cinéma argentique aujourd’hui pollue moins que faire du cinéma numérique…

Olivier

On a réalisé que l’industrie chimique avait des stocks, issus de la guerre 14-18 – les merdes qu’ils mettent dans les champs. Ils avaient envie de continuer à développer de la chimie et c’était bien plus pratique pour eux de fourguer à tout le monde de la chimie pour développer de la pellicule argentique rapidement. Alors qu’il y avait d’autres moyens, beaucoup moins couteux et beaucoup moins agressifs pour l’environnement.

Mahine

Quand on travaillait au labo, on faisait les tests etc. Et quand le film était terminé, monté et tout, on recyclait toujours tout, même les tests, les chutes. Le recyclage c’était un exercice de montage, mais c’était aussi donner une autre vie aux chutes. On réutilisait toujours ce qui était tiré.

Olivier

Justement, Mahine et moi, on avait commencé à faire nos films en faisant les poubelles des labos indépendants. Même les autres du labo disaient « faut faire gaffe aux coupures qu’on jette parce qu’on pourrait les retrouver dans vos films… »

Frédérique

J’ai montré récemment aux Grands Voisins une performance à deux projecteurs d’images tournées en Guadeloupe et développées sur place avec des procédés de développement ne nécessitant pas de composants chimies « pures ». Je passais beaucoup de temps en Guadeloupe à l’époque et j’avais envie de pouvoir travailler sur place. Si quelques photographes sur place ont parfois encore un peu de révélateur et de fixateur, il est impossible de trouver sur place les composantes des procédés C4 ou D96 qui permettent de développer en inversible ou en négatif les films noir et blanc. De plus, que faire des rejets de ces chimies assez polluantes sur une île ?

J’ai donc cherché des alternatives et j’ai découvert le Caffenol et ses dérivés. Le principe est d’associer acide caféïque et acide ascorbique, dans une solution basique. En gros, un mélange de soude caustique, de café et de vitamine C agit comme un révélateur qui développe pratiquement n’importe quel film noir et blanc et même les vieilles Kodachrome 40.  Il existe de nombreuses recettes facilement accessibles sur internet. Il faut adapter les temps selon les films, la température (un enjeu en Guadeloupe quand tous les temps sont donnés à 20° !). Il faut faire de nombreux tests. De plus, la plupart des recettes proposent d’utiliser du café soluble, qui est un produit importé et industriel, alors que le café pousse en Guadeloupe, et que finalement l’acide caféïque est présent dans toutes les plantes !  J’ai testé différentes marques de cafés locaux, et j’ai aussi fait des essais avec diverses décoctions de fleurs, de curcuma de gingembre. 

La difficulté était de fixer l’image. J’ai d'abord pu le faire avec une solution saturée en sel, mais c’est très long (entre 12 et 24h !) ce qui n’est pas très pratique pour les tests. Je me suis donc finalement résolu à apporter de l’hyposulfite. 

C’était très intéressant de pouvoir développer en négatif, mais je voulais aussi pouvoir projeter directement les images, sur place ou ailleurs, sans passer par une copie. J’ai alors cherché les moyens de faire de l’inversible. Grâce au réseau Filmlabs sur lequel nous partageons des connaissances et expériences, je me suis inspirée d’un procédé inspiré par Ricardo Leite, d’Atomo 47 (un labo au Portugal), mêlant eau oxygénée et citron. Pour l’eau oxygénée, j’ai utilisé un produit qui permet de nettoyer les piscines. 

Tout cela m’a pris du temps et j’ai finalement fait très peu de films avec ces procédés. A part les films projetés aux Grands Voisins, il existe Weni Wine, entre ciel et mer, fait avec des femmes en convalescence après un cancer. Un film fait avec des fleurs qu’elles m’ont apportées.

J’ai trouvé très enrichissant le fait de chercher des alternatives aux produits nécessaires dans un territoire où on ne trouve pas tout, loin de là. A Paris, ou quand c’est possible, je préfère développer avec des procédés photochimiques habituels, maîtrisés. Mais l’idée de pouvoir développer n’importe où, avec des produits locaux, me semble très importante. Et même si les résultats n’étaient pas d’une grande précision, certains « accidents » m’ont beaucoup intéressée. Il y a quelque chose de très organique dans ce travail et je sais maintenant qu’à condition d’avoir de l’émulsion couchée sur un support, je peux produire une image. 

Emmanuel

A l’époque de la création des images de Parties visible et invisible, je me suis retrouvé en Afrique. On est partis avec ma compagne au Togo, on s'est retrouvé, moi à Lomé, elle à Kévé. On avait cette maison qui étaient en plein milieu de la brousse où devant la fenêtre tu voyais une sorte de paysage un peu aride, avec deux, trois arbrisseaux qui poussent.

Comme le temps sur place était long et que je savais que j'y resterais entre six mois et un an, j'ai commencé à faire quelques trous dans le sol, à mettre des piquets et à enterrer de la pellicule. C'était de la pellicule développée, mais non exposée.

Un film qui n'est pas exposé à la lumière mais qui est développé, va résulter en ruban de plastique transparent sur lequel est déposé toutes les couches de l'émulsion, et donc une image noire. Il me semble que l'ensemble des possibles se trouve là, dans cette couche d'émulsions où toutes les couleurs sont mélangées les unes avec les autres. C'est vraiment la théorie de la synthèse additive ou soustractive : dans un sens elle est additive en peinture, et au cinéma elle est à l'inverse, soustractive. Toutes les images possibles au monde sont déjà là, dans ce photogramme noir. Il s'agit d'en extraire la matière : en grattant, en enterrant la pellicule sous le sol, en filmant du fait de la résultante de la lumière sur ces molécules photochimiques... C'est en cela qu’on peut parler de révélation, c'est à dire que l'image, elle, est déjà présente ; après, c'est la stratégie de l'artiste qui va faire qu'elle se révèle. Littéralement, c’est ce que j'ai développé d’abord à travers Underground, et ensuite donc dans Parties visible et invisible d’un ensemble sous tension en enterrant la pellicule.

J'ai fait ça de manière très méthodique, c'est à dire que j'ai créé un premier puits en arrivant. Un mois plus tard, j'ai fait un deuxième puits, un mois plus tard j'ai créé un troisième puits, pour jouer sur la question temporelle, sur l'exposition de cette pellicule en des temps différents et en créant à chaque fois différentes émulsions. Puis, il y a des choses que j'ai déterrées, que j'ai récupérées, pour voir comment les choses évoluaient, comment ça réagissait avec la chimie du sol sur place.

J'ai fait ça pendant six mois de manière méthodique, avec un cahier, en notant tout. Parallèlement à ça, j'avais une caméra super 8 légère. Elles ont cet avantage d'avoir pratiquement toujours des timelapse intégrés à la caméra. J'ai filmé en plan fixe ce paysage qu’on voyait de ma fenêtre, à une vitesse d'un certain nombre d'images par minute qui me donne un timelapse de 7 minutes pour une journée.

Je me suis retrouvé avec une image en Super 8 positive - puisque c'était de l'inversible - de ce paysage, et toutes sortes d'images que j'avais déterrées depuis ces puits que j'avais créé dans ce petit village. En rentrant en France, j'ai décidé d’utiliser ce paysage comme un masque. Je l'ai gonflé en 16mm et je l'ai fait avec de la pellicule high-contrast noir et blanc. Les gris clairs deviennent donc blancs et les gris foncés deviennent noir. J'en ai tiré une copie positive et une copie négative de cette même image. Ensuite j'ai fait des tirages contact avec toutes les images enterrées, de manière que chaque image ait son pendant négatif. Du coup, je me suis retrouvé avec ces matrices de quatre images : la pellicule enterrée A et la pellicule enterrée B qui était son négatif, et mon paysage A et mon paysage B qui était son négatif. A partir de ça, j'ai créé une partition, pour faire une sorte de cinéma tissé, - un peu comme Rose Lowder peut faire à sa manière - en mélangeant ce positif et ce négatif, ces quatre matrices d'images.

J'utilisais ce principe à la tireuse optique qui est intéressant : le principe de la synthèse additive et soustractive. Quand tu mélanges deux images ensemble en bi-pack, les noirs vont tout obstruer et tu vas voir apparaître l'image que dans les blancs. Mais si tu fais la même chose en faisant de la double exposition - c'est à dire exposer le photogramme, revenir en arrière et réexposer les photogrammes - c'est l'inverse qui se produit, c'est à dire que le blanc va tout cramer et va faire disparaître tous les sels d'argent et tu ne pourras plus rien réimprimer sur ce blanc.

Je pense que le film est abordable sans connaître aucun de ces détails. Même quelqu'un qui ne connait rien au cinéma expérimental ou qui n'est pas habitué à voir ce type d'images, va bien se rendre compte que formellement, il y a un travail, il y a un clignotement, il y a un paysage et quelque chose qui se déroule... Après, évidemment, quand on connait le processus un petit peu plus, il y a des portes qui s'ouvrent. Tout d'un coup, la chose prend plus d'ampleur et je trouve que c'est intéressant, ces espèces de petites portes secrètes.

C'est un peu comme cette histoire autour de Lacan et de L'Origine du monde. Chez lui, il avait une espèce de petit cabinet. Il y avait un rideau que tu ouvrais et là, il y avait un tableau d’André Masson, qui lui-même cachait L'Origine du monde de Courbet. C'est cette espèce de jeu que je trouve intéressant.

Effectivement, sur le plan de l'écologie, il y a tout simplement ce monde bactériologique qui, littéralement, est figuré comme ça sur la pellicule. C’est le temps qui déroule aussi, ce n'est pas juste l'effet d'un bain dans lequel tu plonges la pellicule et ça y est, t'as ton image. Il s'écoule des heures, des jours, des semaines, des mois avant que l'image se forme. Il y a des cristaux, il y a toute une série de processus chimiques en œuvre qui font que l'image se forme. Précisément, ces cristaux qui se forment sur la pellicule enterrée, se sont créés dans un temps très long en comparaison aux images numériques d'aujourd'hui.

C’est cette espèce de transport du déroulement temporel entre ce que t’as une fois que le ruban physique est posé sur une table et ce qu'il devient une fois qu’il est enroulé dans une bobine et qu'il se déroule à l'intérieur d'un couloir de projecteur. Pour moi, le geste du cinéaste, il est là, c’est cette maîtrise du temps.

Dans les films suivants, Le Pays dévasté et I Don’t think I can see an Island, j’ai surtout travaillé le traitement croisé, qui consiste à développer des émulsions dans des bains qui ne leur sont a priori pas appropriés. Donc tu filmes les images, tu développes, t’as aucune idée du temps qu'il faut laisser dans les bains pour qu’il y a une image qui apparaisse. La plupart du temps, tu sors de la pellicule qui est toute blanche ou toute noire, et tu te dis « merde, je n’ai rien ». puis surtout, le moment où l'image apparaît, quelque fois c'est sur des plages du temps très, très court. Donc, il faut être aussi précis dans les températures de tes bains parce que sinon les temps varient et tu ne reproduis pas le même résultat. Des fois, t’as un test, tu te dis « c'est magnifique, super, je le refais », puis tu le refais dix fois et tu n'y arrives toujours pas, et tu comprends qu'il manque un degré dans le bain en fait, il faut pousser un peu plus etc. Donc, ça a été des expériences très, très longues.

Entre l’enterrement et le traitement croisé, on peut voir exactement le même genre de stratégie. On a un motif, un paysage, mais qui ensuite se révèle véritablement à travers les processus de traitement croisé. Sa vraie nature, en tout cas celle que je veux montrer et qui à première vue est invisible à l'œil nu ou à l'œil du spectateur, se révèle à travers le développement de ces processus particuliers.

 

Représentation et images de l’Anthropocène

Olivier

Il y avait un cinéma qui s’appelait le cinéma du réel. Nous ça nous semblait non seulement un sophisme mais vraiment une véritable escroquerie. Il n’y avait pas de « réel ». Ce dont on parle c’est bien le monde, tel que nous on le voit, mais il n’y a rien du « réel ». Je ne veux pas embellir le réel, mais je veux le montrer avec les couleurs à moi. Les impressionnistes sont arrivés au moment où la photographie a remplacé la peinture, au moment où on allait finir avec la peinture de l’Histoire et commencer avec le photoreportage. Avec le cinéma, on n’en est plus à faire des actualités pour dire comment vont les troupes sur le front, ni de raconter des petites histoires, on est plus à inciter les gens à faire un voyage. « Laissez-vous aller, on va vous emmenez dans un endroit que vous n’avez jamais vu qui n’existe pas ».

Dans Tahousse [2006], on crée un monde, un peu à la Murnau mais en couleurs. Depuis un moment on sentait que ça allait mal terminer, que ça irait très mal sur terre. On s’est dit que la Nature allait se réveiller, qu’elle allait tout foutre par terre et que l’Homme allait subir un sale quart d’heure, avec beaucoup de morts, où tout s’effondrera. Mais l’espoir c’est que les survivants auront appris quelque chose. Ils continueront à cultiver la terre, ils continueront à porter les ballots de paille, ils vont continuer à cueillir et chasser, mais ils ne prendront pas plus que ce dont ils ont besoin. Ils seront plus précautionneux. Quand on voit un type porter de la paille ou labourer la terre dans le film, c’est recommencer une vie sur les ruines du monde avant, mais d’une autre manière. Leur vie deviendra plus contemplative, ils auront plus compris que le rôle de l’Homme sur la terre c’est de regarder la nature. Ce n’est pas moi qui le dit, c’est Kennan, l’ermite chez qui on allait en Suisse, qui vivait seul et qui lisait Nietzsche et Rainer Maria Rilke avec du feu de bois et son chien. Quand on discutait avec lui, il disait que le rapport entre la Nature et l’Homme c’est que l’Homme doit chanter et dire à la Nature tout le temps comment elle est belle. C’est ça Tahousse, c’est : « regardez, la Nature est belle ». Elle est cruelle, elle est brutale, vous lui en voulez, vous lui traitez mal, mais : elle est belle. Elle sera toujours belle, quoi qu’il arrive, même dans le désastre elle reste belle.

Le Granier [2007], c’est quand même un tremblement de terre, c’est l’apocalypse. Le fait que la fixité de l’image Super 8 ne soit pas bonne, ça augmente l’effet de tremblement de terre. Tout le long du film, l’image est toujours en train de trembler. Elle est toujours en train de palpiter comme un truc vivant, mais en même temps comme quelque chose qui souffre, comme un voyant rouge qui s’allume. On ne peut montrer que de beaux fantômes au cinéma, c’est des spectres. Ça a été, ça n’est plus, mais c’est là quand même. C’est une image qui revient. Quand on dit on révèle une image, on fait revenir d’outre-tombe ce qui est caché dans le noir, quelque chose qui était mais qui n’est plus.

Frédérique

Le jardin est le fruit d’une rencontre avec une femme en Guadeloupe, Thérèse Bandou. Je voulais filmer des mains qui sortent des tubercules de la terre pour un autre film, toujours en montage, où il est plus directement question de la mort, de la perte, mais aussi de la manière dont on reprend corps face au gouffre d’un deuil. Quand j’ai rencontré Thérèse avec ce désir de filmer ses mains au travail, elle a compris immédiatement et m’a dit « ce jardin c’est mon deuil ». Elle m’a dit aussi « pour moi, le corps et la terre c’est la même chose ». 

Avant de la filmer, j’ai travaillé au jardin avec elle. C’était une expérience très forte de sentir la chaleur tropicale en restant accroupie au plus près de la terre, dans la brûlure du soleil.  Puis j’y suis allée avec ma caméra. Parfois je filmais, parfois je l’aidais, selon la lumière et mon envie. 

Avec ce film j’ai voulu restituer l’expérience puissante de me sentir physiquement traversée par cet environnement, et d’une certaine manière, remise en vie par la rencontre de cette femme. 

Je dirais avec du recul que ce n’est pas juste une continuité entre corps et environnement, mais plutôt une danse, un mouvement qui fait la relation de l’un à l'autre. Thérèse dans Le jardin est sans cesse au travail. Elle brasse, elle masse, elle arrache, elle plante, elle marche, elle regarde. On peut se fondre dans la terre et mourir, mais on peut aussi « danser » avec elle.  Et c’est peut-être ça vivre. C’est sa manière d’être au monde, agissante. Je crois que ce que j’ai voulu inscrire c’est cet engagement de soi par le corps. Le jeu, la connivence avec le monde naturel quand cela est possible. Et filmer avec cette pellicule parfois périmée, inversible, dans un temps indéfini entre travail au jardin et prise d’images et de son, au corps à corps avec elle grâce à ma caméra 16 est pour moi aussi une manière d’être vivante au monde.

Emmanuel

Au départ de la création du Pays dévasté, je n'avais pas imaginé une seule seconde faire un film qui portait à ce point-là sur la question écologique. Mais je lisais en même temps, et je commençais à m'intéresser vraiment à la question de l'Anthropocène. Au fur et à mesure je faisais des lectures autour de Bruno Latour. Parallèlement, des lectures assez intenses sur les textes de Gunther Anders, notamment sur L’obsolescence de l'homme, sur toute la question de ce qu'il appelle la société post-atomique : cette nouvelle responsabilité que porte l'Homme dès lors qu'il comprend l'atome et qu'il est capable de s'autodétruire lui-même. J'y ai vu des parallèles, des analogies hyper intéressantes entre ces deux modes d'obsolescence. L'homme qui est capable de s'autodétruire pour la première fois, que ce soit par l’intensité de l’agriculture ou des industries…

Puis, en même temps, il y a ce poème – qui est quand même un long texte – de T.S Elliott, The Waste Land. Notamment, ce dernier chapitre où il est question de dévastation, d'inondations, de terre qui part à vau l'eau, qui n'a pas tant été vraiment l'inspiration du film, mais qui a inspiré le titre. C’est ça que je trouve beau dans la construction d'un film, toutes ces réflexions, ces lectures, cette culture en amont qui précède, ont donné naissance au film et à ce qu'il est aujourd'hui. Au fur et à mesure de sa fabrication il m'est apparu évident que j'étais en train de travailler sur cette question-là. J’essaye en quelque sorte de montrer une image de ce que ce monde sera une fois que l’humanité n’y sera plus.

J'avais ce plan que j'avais filmé en Martinique, que je trouvais assez fascinant. Un plan de mangrove où il y avait cette espèce de motif de réseau, de rhizomes qui se croisent. Je trouvais qu'il y avait justement dans cette image quelque chose de très parlant sur cette espèce de phénomène intriqué qui était en train de se jouer et qui là aussi révélait quelque chose d'invisible, quelque chose qu'on ne voit pas au premier regard.

C’est devenu un moment important dans le film final, une séquence de bascule entre une image figurative – certes en négatif, certes déformée par rapport à une image réaliste de laquelle on a l’habitude – vers cette espèce de maillage, ce rhizome que représente la mangrove. C’est toujours cette idée de représenter un monde invisible. Si tu détournes le regard et si tu fais un peu plus attention aux détails tu te rends compte qu’il y a toute une vie qui se déroule sous toi, à côté de toi, autour de toi, mais qui n’est pas visible comme ça à priori. Quelque chose qui couve et qui est en train de se dérouler sans qu’on en ait vraiment conscience.

Dans I don’t think I can see an island, le cœur du film c’est peut-être surtout la question de la perception, comme on le voit dans le titre. Qu’est-ce qu’on voit ? Est-ce ce que je crois voir est vraiment ce que je vois ? C’est toutes ces questions-là qui sont soulevées. Mais sous-jacent au film, la question écologique est posée. C’est un paysage qui est en dissolution absolue, quelque chose qu’on trouve aussi dans Le Pays dévasté. Il y a vraiment cette idée de montrer un paysage tel qu’il sera probablement dans le futur. Avec toute sa beauté aussi, car le désastre, parfois, rend les choses d’une beauté inouïe.

Il n’y aucune trace humaine dans ces films. On voit seulement des traces du vivant dans Le Pays dévasté : on voit notamment une sorte d’atterrissage d’oiseau, une sorte de grande cigogne. Il y a encore du vivant, mais il en reste presque plus. Il y a cette espèce de disparition de l’Homme. Parce que la question de l’Anthropocène est là : ce n’est pas tant qu’on détruit la planète, c’est qu’on transforme la planète, on fait que la planète ne soit plus un habitat pour l’Homme. C’est l’humanité qu’on détruit, ce n’est pas tant la planète elle-même. L’existence de l’Homme elle-même est une poignée de secondes en comparaison à la durée d’existence des dinosaures par exemple. Ce sont des phases qu’on traverse, et l’Homme en ce moment traverse une phase où il existe sur Terre, mais il n’a pas existé par le passé, il n’existera probablement pas dans le futur. Donc nous, on témoigne de ce moment-là mais en l’occurrence on raccourcit notre temps de présence sur ce territoire en agissant comme on agit.

 

Traces…

Frédérique

Dans le film Mue(s) [2015], l’émulsion est bouleversée dans sa structure, mais l’image du corps reste visible, identique finalement, tout en étant transformée. Quelque chose s’échappe, se détache, se transforme pour que le corps puisse continuer à être là. Mues était d’abord une installation plastique : des empreintes de fragments de corps de femme, comme des peaux de plâtre. C’est le travail de ma sœur, Nathalie Menant, et j’ai moi-même été le modèle de la première mue. Entre le moment du moulage et le moment ou le plâtre se détache, il y a un moment très troublant. Je voulais restituer ce mouvement intérieur.  L’émulsion se détache comme une peau mais le corps reste entier, renouvelé, portant la trace de ce passage, de cette mue.

Je tourne principalement en 16mm avec des magasins de 30 m, 2’40. C’est très court, ce sont de tous petits fragments que je prélève pour faire image. Mais chacun ensuite ouvre des espaces plus vastes, notamment grâce au travail du son, recomposé, asynchrone. Il s’agit de recomposer quelque chose, et non d’enregistrer - ce que j’ai plus de mal à faire en numérique, qui est pour moi un flux sans début ni fin, sans ancrage. 

Au contraire, tourner en argentique implique de travailler avec du matériel mécanique. Il y a dans la caméra un petit moteur, un mouvement interne, une horlogerie qui déplace la pellicule, photogramme après photogramme. C’est un enregistrement du temps. La vibration de cette mécanique, plus ou moins marquée selon les caméras, participe du sentiment de saisir un intervalle de temps, un fragment du flux qui nous traverse. C’est comme anticiper une archéologie future. Je n’enterre pas de bobines dans la terre mais j’ai le sentiment de fabriquer des petits bouts des images de mon temps que l’on retrouvera épars, quelque part. Des traces fugaces d’un passage. 

 

Olivier

Mahine et moi, on adorait partir avec 20 kilos de matériel sur le dos et aller où dans des endroits où il n’y avait pas d’électricité, où il fallait moudre le café le matin, allumer le feu, faire chauffer l’eau… C’était sublime, parce qu’on allait dans des endroits où il y avait des salamandres, et quand il pleuvait et l’eau des cascades on pouvait la boire. C’était en Suisse, en Italie, en Lozère, et on adorait filmer les paysages. Puis c’était magique, parce qu’on mettait la caméra sur intervallomètre, on s’asseyait et on rêvassait.

Donc on n’était pas des paysagistes abstraits, comme l’Ecole de Paris, les types comme Bazaine et Manessier, mais il y avait un peu de ça, on se laissait imprégner des choses. On ne partait jamais avec l’idée de faire un film, mais toujours avec l’idée de faire des images. On va aller chercher des images comme on va à la cueillette, comme on va à la promenade. On se dit « qu’est-ce qu’on fait de ces fruits, est-ce qu’on en fait de la confiture, est-ce qu’on les fait sécher ? » : c’est un peu comme ça.

Yâd [2013], c’est un peu différent, c’est la guerre. Mais la guerre sans le truc américain où il y a des explosions partout sans une goutte de sang. Au contraire, c’est les paysages vides. Il n’y a plus personne. Ils sont tous morts. On croirait qu’il pourrait y arriver quelque chose, mais non, rien. C’est une façon de dire que toutes les guerres se ressemblent un peu. Tout le long du film, on parle des immeubles qu’on a construit sur les cadavres et les cimetières qu’on a retournés par les bombes. A l’endroit de cet ancien cimetière, qui était bombardé, où les enfants jouaient et où on voyait les explosions et les squelettes ressortir de terre, et où les gens sont morts aussi, et qui est devenu un champ de bataille, qu’est-ce qu’on y voit maintenant ? Eh bah maintenant ils y construisent des immeubles. On y voit une grue sur un paysage de montagne, avec des sons de chantier. Yâd parle donc de l’effacement des traces…

 

Emmanuel

A la différence du numérique, l’image produite en photochimique est vraiment une impression. C’est comme au temps de Gutenberg : t’as une surface, une matière sur laquelle tu imprimes une image. Une fois que le film existe, tu peux saisir la pellicule à mains nues, regarder par transparence et voir ton image. C’est quelque chose qui est complètement impossible avec un DCP ou un fichier numérique, cette dématérialisation qui fait que ce ne soit pas tangible. Précisément, puisque tu peux la saisir, tu peux aussi intervenir dessus à main nue, tu peux gratter dessus, etc. Je me souviens de cette anecdote de Godard, qui avait besoin d’avoir un rendu un peu plus crade d’une image dans un de ses films, donc il a mis son négatif par terre et il a marché dessus. Bon, c’est un geste qu’il a repris de quelques cinéastes expérimentaux, c’était presque coquet de sa part de faire un truc comme ça. Mais c’est l’idée d’avoir une incidence directe entre le corps du cinéaste et l’image de son film. Il y a cette espèce de rapport intime qui se crée. Dès lors que le film traite de la perception, et même de la question écologique – de la planète, de l’empreinte qu’on laisse sur les choses, etc. – ça me paraitrait complètement antinomique de faire ça en numérique. Je ne vois pas comment je pourrais en parler de manière pertinente autrement qu’en pellicule.

 

Ci-dessous :

Deux captures de "LE GRANIER" par Olivier Fouchard 2007 :

 

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Ci-dessous :

Jaquette du DVD et Capture du film : "YÂD" (La mémoire/ le souvenir)

de Mahine Rouhi & Olivier Fouchard  2013  :jaquette ruine-1

 

photo yad 2

10658

 

Ci- dessous : Photogrames & Captures d'après des films de Emmanuel LEFRANT :

 

"PARTIES VISIBLE ET INVISIBLE D'UN ENSEMBLE SOUS TENSION (E.LEFRANT 2009)" : 

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"LE PAYS DÉVASTÉ" (E.LEFRANT 2015) :

11311

 

Ci-dessous : FRÉDERIQUE MENANT : Image du film  : "MUE(S)"

Mue(s)— un film de Frédérique Menant  2015 :

2176

 

OVERFLOW

 

("REVEAL TRACKS" / ARTICLE BEING WRITING BY CHARLIE HENRICKSON):

ORIGINAL ARTICLE IN ORIGINAL DRAFT BEFORE REWRITING AND EDITORIAL CORRECTIONS (?)

FROM A CONVERSATION WITH CHARLIE H. VIA SKYPE ...:

Version: 1.0 StartHTML: 0000000167 EndHTML: 0000097306 StartFragment: 0000000454 EndFragment: 0000097290

 

How can cinema represent the Anthropocene? What is an "ecological" cinematographic image? In "Ecoaesthetics. A Manifesto for the XXIst Century ", Rasheed Araeen intends that an ecological art must imperatively abandon the paradigm of representation and turn to processes of continuous transformation. Let’s abandon the reified, frozen objects that we still find in museums, implores Araeen, to allow the emergence of an art that would finally be ecological and that will take advantage of the living and productive processes of the earth.

Adding Araeen may seem impossible for the movies. Because the cinematographic image, is it not a certain reification? To record an image is to freeze, to freeze a moment which otherwise would only be flux: "Artificially fixing the carnal appearances of being is to tear it from the river of duration: to tie it to life", wrote Bazin. In order for the image to present itself as ecological in the sense of Araeen, it would perhaps be necessary for it to make visible the process of its creation. Certainly, Jacques Rivette said that "any film is a documentary on its own shooting", but that remains in the domain of the representative paradigm. Rather, we must look for images that can bear material traces of the processes, physical contacts of the image with the world. Because, as Stephen Rust and Salma Monani write in their reference work Ecocinema Theory and Practice: to think ecocritically of cinema, it is first to understand that it is culturally AND materially located [embedded]. But also because this idea of ​​traces, is it not a central concept of this era in which we find ourselves, the Anthropocene?

To find this kind of cinematographic creation, it is perhaps necessary to go to see on the side of experimental cinematographic production, and more precisely on the side of experimental silver and contemporary production, in the networks of cinematographic laboratories of artists. This may seem paradoxical at first: silver film is a priori synonymous with industrial creation, and above all can an "obsolete" medium be the tool conducive to the creation of images that can account for the ecological thought, resolutely contemporary thought? However, on closer inspection, it is indeed not so paradoxical.

Not so paradoxical, because as Yann Beauvais, Patricia Mellencamp and others write, experimental cinema is always first and foremost a practice. Not so paradoxical, because as Scott Macdonald - the first to use the term "eco-cinema" in the early 2000s - writes cinematographic film precisely embodies this struggle between permanence and the ephemeral: "we can expose to light and see the images captured there, but we know that this light that allows us to see the series of still images along the celluloid strip causes them to be erased and, more so, that the formal presentation of this Art accelerates its inevitable destruction ”. Not so paradoxical, then, because we know it from Peirce, from Bazin and from Barthes, the photographic and cinematographic film is first index, that is to say, means of creating signs from traces, impressions . Not so paradoxical, yet, because to think of an image that bears the traces of its integration into the "mesh" of which Timothy Morton speaks, it requires above all a material image, a physical image. Not so paradoxical, finally, because the experimental practices of silver film that we find in the global networks of self-managed laboratories are part of a fierce desire to get out of industrial logic, and that it is in these places that the question of alternative and ecological manufacturing of materials arise.

If the creation in many countries of these cinematographic laboratories of artists dates from the beginning of the 1990s more or less, their origins go back to the beginnings of cinema. Before the massive industrialization of cinema, the first filmmakers had to be involved in all stages of the creation of their films: shooting, editing, but also development and printing. Of course, with the industrialization and commercialization of the cinema, the great powers like Pathé, Eastman-Kodak, and later Fujifilm centralize the production of film, and install their laboratories for the creation and development of silver film everywhere in the world. Quickly, development and printing practices were no longer the domain of artist-filmmakers, but of laboratory technicians from Kodak, Fuji and others. Historically, we are witnessing a split between the different stages of film production: shooting and editing reserved for "artists", and the other stages reserved for "technicians", "chemists" of large laboratories. Certainly, some marginal practices of development and circulation by the artists themselves and themselves persist over the years, especially in amateur cinema, and with some famous filmmakers like Robert Flaherty and Alexandre Medvedkine. However, it was only really from the 1960s and 1970s, at the time of the creation of "cooperatives" in the field of experimental cinema, that this practice began to be used systematically and organized at some groups of artist-filmmakers. We can especially mention the London Film-Maker's Co-op, which in 1966 created not only a cooperative for the distribution and distribution of experimental cinema, but also a laboratory managed by the filmmakers themselves and themselves, according to the desire to make available common and shared production tools for all those who want to use them (Malcolm Le Grice, co-founder of LFMC also proposed to government authorities of the time to follow this example also on a larger scale: finance production tools rather than individual works). Beyond this attempt in London, on the other hand, it was not until the 1990s that the idea spread to other countries in the world.

It was in 1990, in Arnheim in the Netherlands, that the first independent and self-managed artists' laboratory was created, created by three students from the Arnheim School of Fine Arts: Karel Doing, Saskia Fransen and Djana Mileta. Refusing to accept that their school gets rid of the film production material to make room for the video material, the three classmates decide to create the Studio één, place of development and creative DIY film. Two years later they were followed by the creation in Hanover of "Sector 16", and of "Atelier MTK" in Grenoble, in the squat "Le 102". Very quickly in France, MTK was overwhelmed with requests from filmmakers to use their lab, and thus built up the “Ebouillanté” network in France from 1993, allowing the creation of laboratories for self-managed artists all over France: “Mire "In Nantes," Burstscratch "in Strasbourg," Belle de Mai Lab "in Marseille, and two labs in Ile-de-France," L'Abominable "(first in Asnières, now in La Courneuve) and" L'Etna ”(first in the 3rd arrondissement of Paris, now in Montreuil).

Since 2005, there has been an organized network of labs from around 20 countries around the world, Filmlabs, whose website can be viewed here: filmlabs.org. We can read on this site a definition of these laboratories as being a "territory of experimentation of the cinematographic beyond any" genre "at a time when the industry is gradually abandoning the film medium". More broadly, these labs present eminently fertile territories for thinking differently about the creation of cinematographic images, above all by reintegrating materiality and chemistry as central elements of production.

We thus went to meet four French filmmakers, all associated with these networks of craft labs, to discuss how we can think of ecology through film creation. Emmanuel Lefrant is an experimental filmmaker who lives and works in Paris, as well as director of the distribution structure for the experimental cinema Light Cone. If his first films mainly explored the "abstract landscapes" of the film emulsion, his last three films - Visible and invisible parts of a set under tension [2009], Le Pays devasté [2015] and I don't think I can see an island [2016, co-produced with Christophe Becks], include more figuration, and relate more specifically to ecological themes. Frédérique Menant is a documentary filmmaker and experimental filmmaker, who also lives and works in Paris. After studying anthropology, she turned to documentary cinema. She first made films in digital, then converted to film creation after a production workshop in Lussas, and met him with, among others, Vincent Sorrel, Pierre Hanau, Catherine Bareau and Philippe Côte. By integrating Etna and Abominable, she co-founded there with other female filmmakers "La Poudrière", a group of feminist filmmakers. His most recent films are from his stay in Guadeloupe, and experiment with development processes using "natural" materials such as coffee, or flowers. Finally, Olivier Fouchard and Mahine Rouhi are a couple of filmmakers and artists who live and work near Grenoble, and have worked a lot in the Atelier MTK. They have created a large number of experimental, organic and subversive films since 1999, and are often described as "alchemist" filmmakers, in line with others like Jurgen Reble and Nicolas Rey.

The four filmmakers work in their own way on the question of an "ecological" look and image in their respective films, often also favoring the crossing of natural landscapes and the chemical and physical transformations of the image printed on film. . With each of these filmmakers, we tried to reflect together on the Anthropocene, the ecology of the material tools they use, the processes and traces that can be found in their films ...


Argentic vs. digital

Emmanuel

There are several aspects that interest me in film creation: first of all, I find that the question of flicker and beat is very interesting. This is something that cannot be found during a digital projection. After, the second aspect is the photochemical matter which, from my point of view, is truly a living matter, which I think is illustrated with enough dignity in Underground [2001] or Visible and invisible parts of an energized set [2009], and even later, with Le Pays devasté [2015] and I don't think I can see an Island [2016] on the question of cross-processing. The third point, which is essential, is the question of tangible matter. Each artist has their own tools. When I have a ribbon of film in front of me, it's like a sculptor or a painter. I really feel like I have a surface, a world of possibilities that opens up and to have the possibility, with my hands and with touch, of being able to have an action on the image that I will generate through the movie I'm going to make. It is really this tactile relationship to the material that interests me.

The digital image, if you look at it up close and frankly, is the result of a calculation. It is an accumulation of zeros and ones, which define how the pixel from top left will behave and what color will be the one from bottom right. Here, we are on a completely different relationship, it is really a matter-to-matter relationship. How light acts on silver salts ...

Frédérique

When filming, I always looked for something beyond the figurative. Something like presence in the world. Being there, somewhere, filming as much from where I look as I do, looking for a mental landscape rather than a capture of reality.

 I have a feeling that digital is physically taking me away from the world. The film brings me back to a materiality of the image that provokes something of another order. It’s about incarnation. I have the feeling that the places and the people I film "go down" in the image. Is embodied in another way, persistent. Are part of an alchemy of light. I have the idea that photons by physically transforming matter, transfer something from physical reality to the image.

On the image itself, even when my films are figurative and documentary, the emulsion is a material that is closer to painting than digital flicker.

 

Olivier

What is interesting in this film cinema is that we are not proletarian. When you're at a computer, when you're at a phone, you don't know how it works, much less how to fix it. When you’re in front of a DCP and it breaks down, you can do nothing but make a call to maintenance. Formerly the projectionist not only maintained his machine, repaired it, ordered the parts and could put them down, but could also dismantle and reassemble the machine, like a clockmaker with a clock. It’s interesting because it’s the opposite of proletarianization.

Emmanuel

Hollywood has decided to impose room formats that are FADs. What you have to understand is that on the silver channel, you have the manufacturing of the film, then the filming as such - the filmmakers who film with their Bolex etc. -, then the labs that make copies, the sound, the print, etc., and then the distribution in theaters. As soon as you cut an element of the chain, everything collapses. Hollywood has decided to cut the circulation, that is to say that we remove all the projectors, we screw everything up in the trash and we replace it with digital projectors, that we will sell to the whole world and we will be a cash not possible, and save on shipping and all that. But by doing that they killed the labs, they killed Kodak, they killed everyone. So, for now Kodak is surviving, but surviving with difficulty. The day Kodak stops making film, who can make film? More people ! It’s very complicated in reality to have a plastic tape that is precisely 16mm wide, where the perforations are to the nearest quarter of a millimeter in the right place, where the photochemical sensitive layer is coated in the right place and regular. These are industrial processes that you cannot do like that.

Olivier

There has always been this concern at MTK, and among the people of the L'Ebouillanté network, of gaining independence from industry, of making its own chemistry etc. The day we stop making film, they will find ways.

What is subversive in the cinema we make is that we say to people: it's easy, you can do it yourself. Everyone can paint like Michelangelo or Van Gogh, everyone can film like Cassavetes or Kubrick. We're only Cassavetes or Van Gogh once, but it's not something inaccessible. This is extremely subversive, because the contemporary art market, the delirium of Hollywood, the Cannes festival and stuff like that, is saying to people "this is not for you, these people - they are exceptionally gifted, they are brilliant, they will always surpass you by a head ». What we did with experimental cinema is to tell people: it's possible. Beauty is possible, it is accessible, you can go there when you want, you just have to spend a little time and you could do it all.

 

An ecology of tools…

 

Olivier

Cinema was first of all experimental and artisanal. Then it became industrial and extremely violent, of course. 24 frames per second is the burst, and it is the burst of industrial society, capitalism, neoliberalism.

I tend to think of cinema more as a frivolous activity, but it's pretty violent anyway. You need energy, you have to pollute water, you need electricity ... It's a transformation of fire. The fire has evolved. Fire was discovered, then with powder and then nuclear: there has been a spectacular evolution since the Neolithic. Ecology is also that.

I know that making films is a pain in the ass, because we pollute water. At the same time I tended to give myself a good conscience by telling myself that Gaumont, Pathé, Kodak, all that, to print peanut pubs, chocolate bars, and then trailers for advertising - which we projected in 35mm in theaters at the time - I did the math: they polluted more water than we would ever pollute. It was to give me a good conscience.

The ecological question arises, therefore, because we pollute the water, but also because when we look at things in the face: what is film? This is emulsion, which is made from sheep gelatin. So there were flocks of sheep, and every time they had a large order of film they made a Treblinka, it was a massacre! Regularly, once the cinema really became an industry, they massacred sheep all over the place.

Then what is triacetate, the medium of cinema? Originally, it was wood, it was cellulose fiber, like making paper. So you realize that to make it a translucent or transparent support, you really have to disgust a lot of fleet. We disgust water, we kill sheep, and then we use disgusting chemistry for development ...

Frédérique

Today filming in film as part of the autonomy of the means of production as we do in self-managed labs constantly involves a fight against waste and the planned obsolescence of high technology.

Of course the film involves polluting elements, the gelatin of the emulsion is of animal origin, the support is a plastic derivative, the chemicals are polluting ... But I really do not think that the components of digital cameras, hard disks of storage, etc. are less so in the end ...

Emmanuel

All image production generates pollution. So obviously, it jumps out to us that the film, since it is necessary to use chemicals which are toxic products, since the film itself is based on polyester or acetate, non-recyclable plastic ... Especially since we attach a chemical material to it so it's even less recyclable. But someone who works in digital, does he pollute less? It seems less obvious, we say that it is cleaner with the iPhone, but in reality we know very well that it is not true. There are still things that are hidden and that are not revealed to the general public. We know very well that batteries generate mind-blowing pollution, that all the rare metals that are contained in the cameras of telephones are extractions in mines. Without speaking about ethics: the children who work there, the exploitation of poor countries, all these raw materials that we will look for in Africa… So I suspect that making film films today pollutes less than making films digital…

Olivier

We realized that the chemical industry had stocks from the 14-18 war - the shit they put in the fields. They wanted to continue developing chemistry and it was much more convenient for them to get everyone in chemistry to develop film film quickly. While there were other means, much less expensive and much less aggressive for the environment.

Mahine

When we worked in the lab, we did the tests etc. And when the film was finished, edited and everything, we always recycled everything, even the tests, the scraps. Recycling was an assembly exercise, but it was also giving another life to the falls. We always reused what was drawn.

Olivier

Precisely, Mahine and I, we had started to make our films by making the trash of independent labs. Even the others in the lab said "be careful with the clippings that you throw away because you could find them in your films ..."

 

Frédérique

I recently showed the Grands Voisins a performance with two image projectors shot in Guadeloupe and developed on site with development processes that do not require "pure" chemical components. I spent a lot of time in Guadeloupe at the time and I wanted to be able to work there. If a few photographers on site sometimes still have a bit of developer and fixer, it is impossible to find on site the components of the C4 or D96 processes which allow black and white films to be developed in reversible or negative. In addition, what to do with the releases of these fairly polluting chemicals on an island?

So I looked for alternatives and discovered Caffenol and its derivatives. The principle is to combine caffeic acid and ascorbic acid in a basic solution. Basically, a mixture of caustic soda, coffee and vitamin C works like a developer that develops almost any black and white film and even the old Kodachrome 40. There are many recipes readily available on the internet. You have to adapt the times according to the films, the temperature (an issue in Guadeloupe when all times are given at 20 °!). There are many tests to do. In addition, most of the recipes suggest using soluble coffee, which is an imported and industrial product, while coffee grows in Guadeloupe, and finally caffeic acid is present in all plants! I’ve tested different brands of local coffees, and I’ve also experimented with various decoctions of flowers, turmeric and ginger.

The difficulty was to fix the image. I was able to do this first with a saturated salt solution, but it is very long (between 12 and 24 hours!) Which is not very practical for the tests. So I finally resolved to bring hyposulfite.

It was very interesting to be able to develop in negative, but I also wanted to be able to project the images directly, on site or elsewhere, without going through a copy. So I looked for ways to do the invertible. Thanks to the Filmlabs network on which we share knowledge and experiences, I was inspired by a process inspired by Ricardo Leite, from Atomo 47 (a laboratory in Portugal), mixing oxygenated water and lemon. For hydrogen peroxide, I used a product that cleans swimming pools.

It all took me a while and I ended up making very few films with these processes. Apart from the films screened at Les Grands Voisins, there is Weni Wine, between sky and sea, made with women recovering from cancer. A film made with flowers they brought me.

I found it very enriching to look for alternatives to the necessary products in a territory where you don't find everything, far from it. In Paris, or when possible, I prefer to develop with usual, controlled photochemical processes. But the idea of ​​being able to develop anywhere, with local products, seems very important to me. And even if the results were not very precise, some "accidents" interested me a lot. There is something very organic in this work and I now know that as long as I have the emulsion lying on a support, I can produce an image.

 

Emmanuel

When I was creating visible and invisible Party images, I found myself in Africa. We left with my partner in Togo, we found myself in Lomé, she in Kévé. We had this house which was right in the middle of the bush where in front of the window you saw a sort of somewhat arid landscape, with two, three shrubs growing.

Because the time was long and I knew I would be there for six months to a year, I started to make some holes in the ground, put stakes and bury film. It was developed film, but not exposed.

A film which is not exposed to light but which is developed, will result in transparent plastic tape on which all the layers of the emulsion are deposited, and therefore a black image. It seems to me that all of the possibilities are there, in this layer of emulsions where all the colors are mixed with each other. It is really the theory of additive or subtractive synthesis: in a sense it is additive in painting, and in the cinema it is conversely, subtractive. All the possible images in the world are already there, in this black photogram. It is a question of extracting the matter from it: by scratching, by burying the film under the ground, by filming because of the resultant of light on these photochemical molecules ... It is in this that we can speak of revelation, that is to say that the image is already present; afterwards, it is the artist's strategy that will reveal it. Literally, this is what I developed first through Underground, and then in Visible and invisible parts of a live set by burying the film.

I did this in a very methodical way, that is to say that I created a first well when I arrived. A month later, I made a second well, a month later I created a third well, to play on the temporal question, on the exposure of this film in different times and by creating each time different emulsions. Then, there are things that I dug up, that I recovered, to see how things were developing, how it reacted with the soil chemistry on site.

I did this for six months methodically, with a notebook, writing down everything. At the same time, I had a light super 8 camera. They have this advantage of having almost always timelapse integrated into the camera. I filmed this landscape from my window in a fixed shot, at a speed of a certain number of images per minute which gives me a timelapse of 7 minutes for a day.

I ended up with a positive Super 8 image - since it was invertible - of this landscape, and all kinds of images that I had unearthed from these wells that I had created in this small village. Coming back to France, I decided to use this landscape as a mask. I inflated it to 16mm and did it with high-contrast black and white film. Light gray therefore becomes white and dark gray becomes black. I made a positive copy and a negative copy of this same image. Then I made contact prints with all the buried images, so that each image had its negative counterpart. Suddenly, I ended up with these matrices of four images: the buried film A and the buried film B which was its negative, and my landscape A and my landscape B which was its negative. From that, I created a score, to make a sort of woven cinema, - a bit like Rose Lowder can do in his own way - by mixing this positive and this negative, these four matrices of images.

I used this principle with the optical printer which is interesting: the principle of additive and subtractive synthesis. When you mix two images together in a bi-pack, the blacks will obstruct everything and you will see the image appear only in the whites. But if you do the same thing by making double exposure - that is to say exposing the photogram, going back and reexposing the photograms - the reverse happens, that is to say that the white goes burn everything and will make all the silver salts disappear and you won't be able to reprint anything on this white.

I think the film is affordable without knowing any of these details. Even someone who does not know anything about experimental cinema or who is not used to seeing this type of image, will well realize that formally, there is a job, there is a blinking, there is a landscape and something that takes place ... After, obviously, when we know the process a little more, there are doors that open. All of a sudden, the thing is gaining momentum and I find it interesting, these sorts of little secret doors.

It's a bit like this story around Lacan and the Origin of the world. At home, he had a kind of small cabinet. There was a curtain that you opened and there was a painting by André Masson, who himself hid The Origin of the World from Courbet. It's this kind of game that I find interesting.

Indeed, ecologically, there is quite simply this bacteriological world which, literally, is represented like that on film. It’s time that is also running, it’s not just the effect of a bath in which you immerse the film and that’s it, you have your image It takes hours, days, weeks, months before the image is formed. There are crystals, there are a whole series of chemical processes at work that make the image form. Precisely, these crystals which form on the buried film, were created in a very long time compared to the digital images of today.

It is this kind of transport of the temporal unfolding between what you have once the physical ribbon is placed on a table and what it becomes once it is wound in a reel and it takes place at inside a projector corridor. For me, the filmmaker’s gesture is there, it’s this mastery of time.

In the following films, The Devastated Country and I Don’t think I can see an Island, I mainly worked on cross-processing, which consists of developing emulsions in baths which are not a priori suitable for them. So you film the images, you develop, you have no idea how long it takes in the baths for an image to appear. Most of the time, you come out of the film which is all white or all black, and you say to yourself "shit, I have nothing". then especially, the moment when the image appears, sometimes it is on very, very short time ranges. So you have to be as precise in the temperatures of your baths because otherwise the times vary and you do not reproduce the same result. Sometimes you have a test, you say to yourself "it's beautiful, great, I do it again", then you do it again ten times and you still can't do it, and you understand that a degree is missing in the bath in fact, you have to push a little more etc. So it's been very, very long experiences.

Between burial and cross-processing, we can see exactly the same kind of strategy. We have a motif, a landscape, but which then truly reveals itself through the processes of cross-processing. Its true nature, in any case the one I want to show and which at first glance is invisible to the naked eye or to the eye of the beholder, is revealed through the development of these particular processes.

 

Representation and images of the Anthropocene

Olivier

There was a cinema called the cinema of reality. It seemed to us not only a fallacy but really a real scam. There was no "real". What we are talking about is the world, as we see it, but there is nothing "real" about it. I don't want to embellish the real, but I want to show it with the colors of my own. The Impressionists arrived at the time when photography replaced painting, at the time when we were going to finish with the painting of History and start with photojournalism. With the cinema, we are no longer doing news to tell how the troops are going on the front, nor telling little stories, we are more to encourage people to take a trip. "Let yourself go, we're going to take you to a place you've never seen that doesn't exist."

In Tahousse [2006], we create a world, a bit like Murnau but in color. For a while we had felt that it was going to end badly, that it would be very bad on earth. We thought that Nature was going to wake up, that she was going to screw everything up and that Man was going to undergo a dirty quarter of an hour, with many dead, where everything would collapse. But the hope is that the survivors will have learned something. They will continue to cultivate the land, they will continue to carry bales of straw, they will continue to gather and hunt, but they will not take more than what they need. They will be more careful. When you see a guy carrying straw or plowing the earth in the film, it's like starting a life over the ruins of the world before, but in another way. Their life will become more contemplative, they will have understood more that the role of Man on earth is to look at nature. It’s not me who says it, it’s Kennan, the hermit we went to Switzerland, who lived alone and who read Nietzsche and Rainer Maria Rilke with a wood fire and his dog. When we talked to him, he said that the relationship between Nature and Man is that Man must sing and tell Nature all the time how beautiful she is. That’s what Tahousse is: "Look, Nature is beautiful". She is cruel, she is brutal, you blame her, you treat her badly, but: she is beautiful. She will always be beautiful, whatever happens, even in disaster she remains beautiful.

Le Granier [2007] is still an earthquake, it is the apocalypse. The fact that the fixity of the Super 8 image is not good, it increases the earthquake effect. Throughout the film, the image is always shaking. It’s still throbbing like a living thing, but at the same time like something that is suffering, like a red light that lights up. You can only show beautiful ghosts in the cinema, they are specters. It was, it is no longer, but it is still there. It’s an image that comes back. When we say we reveal an image, we bring back from beyond the grave what is hidden in the dark, something that was but is no longer.

 

Frédérique

The garden is the fruit of an encounter with a woman in Guadeloupe, Thérèse Bandou. I wanted to film hands that come out of the tubers of the earth for another film, still in editing, where it is more directly about death, loss, but also how we take body face of the abyss of a mourning. When I met Thérèse with this desire to film her hands at work, she understood immediately and said to me "this garden is my mourning". She also said to me "for me, the body and the earth are the same thing".

Before filming her, I worked in the garden with her. It was a very strong experience to feel the tropical heat while squatting as close as possible to the earth, in the scorching sun. Then I went there with my camera. Sometimes I filmed, sometimes I helped him, depending on the light and my desire.

With this film I wanted to restore the powerful experience of feeling physically crossed by this environment, and in a way, brought back to life by meeting this woman.

I would say with hindsight that it is not just a continuity between body and environment, but rather a dance, a movement which makes the relation of one to the other. Thérèse in The garden is constantly at work. She brews, she massages, she tears off, she plants, she walks, she looks. We can melt into the earth and die, but we can also "dance" with it. And that’s maybe living. It’s his way of being in the world, active. I think what I wanted to write down is this commitment of self through the body. Play, collusion with the natural world when possible. And filming with this sometimes outdated, reversible film, in an indefinite time between working in the garden and taking pictures and sound, hand to hand with it thanks to my camera 16 is for me also a way of being alive in the world .

 

Emmanuel

At the start of the creation of the Devastated Country, I hadn't imagined for a single second making a film that focused so much on the ecological question. But I was reading at the same time, and I was starting to really take an interest in the question of the Anthropocene. Little by little I read about Bruno Latour. At the same time, quite intense readings on the texts of Gunther Anders, in particular on The obsolescence of man, on the whole question of what he calls post-atomic society: this new responsibility that man carries when 'he understands the atom and is capable of self-destructing himself. I saw parallels, hyper interesting analogies between these two modes of obsolescence. The man who is able to self-destruct for the first time, whether by the intensity of agriculture or industries ...

Then, at the same time, there is this poem - which is still a long text - by T.S Elliott, The Waste Land. In particular, this last chapter where it is a question of devastation, floods, earth which goes to the water, which was not so much really the inspiration of the film, but which inspired the title. This is what I find beautiful in the construction of a film, all these reflections, these readings, this culture upstream which precedes, gave birth to the film and to what it is today. As it was made it became clear to me that I was working on this issue. I'm sort of trying to show a picture of what this world will be like once humanity is gone.

I had this plan that I had filmed in Martinique, which I found quite fascinating. A mangrove shot where there was this sort of network pattern, of intersecting rhizomes. I found that there was precisely in this image something very telling about this kind of entangled phenomenon that was being played out and that there too revealed something invisible, something that we do not see at first. look.

It became an important moment in the final film, a sequence of rocking between a figurative image - certainly in negative, certainly distorted compared to a realistic image which we are used to - towards this kind of mesh, this rhizome that represents the mangrove. It's always this idea of ​​representing an invisible world. If you look away and pay a little more attention to the details you realize that there is a whole life unfolding under you, next to you, around you, but which is not visible as that a priori. Something brooding and taking place without anyone really being aware of it.

In I don’t think I can see an island, the heart of the film is perhaps above all the question of perception, as we see in the title. What do we see? Is what I think I see really what I see? These are all the questions that arise. But underlying the film, the ecological question is asked. It is a landscape that is in absolute dissolution, something that is also found in The Devastated Country. There is really this idea of ​​showing a landscape as it will probably be in the future. With all its beauty too, because disaster can sometimes make things of incredible beauty.

There is no human trace in these films. We only see traces of the living in The Devastated Country: we see in particular a kind of bird landing, a kind of big stork. There is still life, but there is almost more. There is this kind of human disappearance. Because the question of the Anthropocene is there: it is not so much that we destroy the planet, it is that we transform the planet, we make that the planet is no longer a habitat for humans. It is humanity that is destroyed, it is not so much the planet itself. The existence of Man himself is a handful of seconds compared to the lifespan of dinosaurs, for example. These are phases that we are going through, and Man at the moment is going through a phase where he exists on Earth, but he has not existed in the past, he probably will not exist in the future. So we are witnessing this moment but in this case we are shortening our time on this territory by acting as we act.

 

Representation and images of the Anthropocene

Olivier

There was a cinema called the cinema of reality. It seemed to us not only a fallacy but really a real scam. There was no "real". What we are talking about is the world, as we see it, but there is nothing "real" about it. I don't want to embellish the real, but I want to show it with the colors of my own. The Impressionists arrived at the time when photography replaced painting, at the time when we were going to finish with the painting of History and start with photojournalism. With the cinema, we are no longer doing news to tell how the troops are going on the front, nor telling little stories, we are more to encourage people to take a trip. "Let yourself go, we're going to take you to a place you've never seen that doesn't exist."

In Tahousse [2006], we create a world, a bit like Murnau but in color. For a while we had felt that it was going to end badly, that it would be very bad on earth. We thought that Nature was going to wake up, that she was going to screw everything up and that Man was going to undergo a dirty quarter of an hour, with many dead, where everything would collapse. But the hope is that the survivors will have learned something. They will continue to cultivate the land, they will continue to carry bales of straw, they will continue to gather and hunt, but they will not take more than what they need. They will be more careful. When you see a guy carrying straw or plowing the earth in the film, it's like starting a life over the ruins of the world before, but in another way. Their life will become more contemplative, they will have understood more that the role of Man on earth is to look at nature. It’s not me who says it, it’s Kennan, the hermit we went to Switzerland, who lived alone and who read Nietzsche and Rainer Maria Rilke with a wood fire and his dog. When we talked to him, he said that the relationship between Nature and Man is that Man must sing and tell Nature all the time how beautiful she is. That’s what Tahousse is: "Look, Nature is beautiful". She is cruel, she is brutal, you blame her, you treat her badly, but: she is beautiful. She will always be beautiful, whatever happens, even in disaster she remains beautiful.

Le Granier [2007] is still an earthquake, it is the apocalypse. The fact that the fixity of the Super 8 image is not good, it increases the earthquake effect. Throughout the film, the image is always shaking. It’s still throbbing like a living thing, but at the same time like something that is suffering, like a red light that lights up. You can only show beautiful ghosts in the cinema, they are specters. It was, it is no longer, but it is still there. It’s an image that comes back. When we say we reveal an image, we bring back from beyond the grave what is hidden in the dark, something that was but is no longer.

 

Frédérique

The garden is the fruit of an encounter with a woman in Guadeloupe, Thérèse Bandou. I wanted to film hands that come out of the tubers of the earth for another film, still in editing, where it is more directly about death, loss, but also how we take body face of the abyss of a mourning. When I met Thérèse with this desire to film her hands at work, she understood immediately and said to me "this garden is my mourning". She also said to me "for me, the body and the earth are the same thing".

Before filming her, I worked in the garden with her. It was a very strong experience to feel the tropical heat while squatting as close as possible to the earth, in the scorching sun. Then I went there with my camera. Sometimes I filmed, sometimes I helped him, depending on the light and my desire.

With this film I wanted to restore the powerful experience of feeling physically crossed by this environment, and in a way, brought back to life by meeting this woman.

I would say with hindsight that it is not just a continuity between body and environment, but rather a dance, a movement which makes the relation of one to the other. Thérèse in The garden is constantly at work. She brews, she massages, she tears off, she plants, she walks, she looks. We can melt into the earth and die, but we can also "dance" with it. And that’s maybe living. It’s his way of being in the world, active. I think what I wanted to write down is this commitment of self through the body. Play, collusion with the natural world when possible. And filming with this sometimes outdated, reversible film, in an indefinite time between working in the garden and taking pictures and sound, hand to hand with it thanks to my camera 16 is for me also a way of being alive in the world .

 

Emmanuel

At the start of the creation of the Devastated Country, I hadn't imagined for a single second making a film that focused so much on the ecological question. But I was reading at the same time, and I was starting to really take an interest in the question of the Anthropocene. Little by little I read about Bruno Latour. At the same time, quite intense readings on the texts of Gunther Anders, in particular on The obsolescence of man, on the whole question of what he calls post-atomic society: this new responsibility that man carries when 'he understands the atom and is capable of self-destructing himself. I saw parallels, hyper interesting analogies between these two modes of obsolescence. The man who is able to self-destruct for the first time, whether by the intensity of agriculture or industries ...

Then, at the same time, there is this poem - which is still a long text - by T.S Elliott, The Waste Land. In particular, this last chapter where it is a question of devastation, floods, earth which goes to the water, which was not so much really the inspiration of the film, but which inspired the title. This is what I find beautiful in the construction of a film, all these reflections, these readings, this culture upstream which precedes, gave birth to the film and to what it is today. As it was made it became clear to me that I was working on this issue. I'm sort of trying to show a picture of what this world will be like once humanity is gone.

I had this plan that I had filmed in Martinique, which I found quite fascinating. A mangrove shot where there was this sort of network pattern, of intersecting rhizomes. I found that there was precisely in this image something very telling about this kind of entangled phenomenon that was being played out and that there too revealed something invisible, something that we do not see at first. look.

It became an important moment in the final film, a sequence of rocking between a figurative image - certainly in negative, certainly distorted compared to a realistic image which we are used to - towards this kind of mesh, this rhizome that represents the mangrove. It's always this idea of ​​representing an invisible world. If you look away and pay a little more attention to the details you realize that there is a whole life unfolding under you, next to you, around you, but which is not visible as that a priori. Something brooding and taking place without anyone really being aware of it.

In I don’t think I can see an island, the heart of the film is perhaps above all the question of perception, as we see in the title. What do we see? Is what I think I see really what I see? These are all the questions that arise. But underlying the film, the ecological question is asked. It is a landscape that is in absolute dissolution, something that is also found in The Devastated Country. There is really this idea of ​​showing a landscape as it will probably be in the future. With all its beauty too, because disaster can sometimes make things of incredible beauty.

There is no human trace in these films. We only see traces of the living in The Devastated Country: we see in particular a kind of bird landing, a kind of big stork. There is still life, but there is almost more. There is this kind of human disappearance. Because the question of the Anthropocene is there: it is not so much that we destroy the planet, it is that we transform the planet, we make that the planet is no longer a habitat for humans. It is humanity that is destroyed, it is not so much the planet itself. The existence of Man himself is a handful of seconds compared to the lifespan of dinosaurs, for example. These are phases that we are going through, and Man at the moment is going through a phase where he exists on Earth, but he has not existed in the past, he probably will not exist in the future. So we are witnessing this moment but in this case we are shortening our time on this territory by acting as we act.

 

Traces…

Frédérique

In the film Mue (s) [2015], the emulsion is overturned in its structure, but the image of the body remains visible, ultimately identical, while being transformed. Something escapes, comes off, changes so that the body can continue to be there. Mues was first of all a plastic installation: prints of female body fragments, like plaster skins. This is the work of my sister, Nathalie Menant, and I myself was the model of the first moult. Between the moment of molding and the moment when the plaster comes off, there is a very disturbing moment. I wanted to restore this interior movement. The emulsion comes off like a skin but the body remains whole, renewed, bearing the trace of this passage, of this moult.

I mainly shoot in 16mm with stores of 30m, 2’40. It's very short, these are very small fragments that I take to make an image. But each then opens up larger spaces, notably thanks to the work of sound, recomposed, asynchronous. It's about recomposing something, not recording - which I find it harder to do in digital, which for me is a flow without beginning or end, without anchoring.

On the contrary, shooting in film involves working with mechanical equipment. There is in the camera a small motor, an internal movement, a clock that moves the film, photogram after photogram. It is a record of time. The vibration of this mechanism, more or less marked depending on the camera, contributes to the feeling of grasping a time interval, a fragment of the flow that passes through us. It’s like anticipating future archeology. I don't bury coils in the ground but I have the feeling of making small pieces of images of my time that we will find scattered somewhere. Fleeting traces of a passage.

 

Olivier

Mahine and I, we loved leaving with 20 kilos of equipment on our backs and going where to places where there was no electricity, where we had to grind coffee in the morning, light the fire, heat the water … It was sublime, because we went to places where there were salamanders, and when it rained and water from the waterfalls we could drink it. It was in Switzerland, Italy, Lozère, and we loved filming the landscapes. Then it was magic, because we put the camera on an interval timer, we sat and we dreamed.

So we weren't abstract landscapers, like the Paris School, guys like Bazaine and Manessier, but there was a little bit of that, we let ourselves be impregnated with things. We never left with the idea of ​​making a film, but always with the idea of ​​making images. We are going to look for images as we go to picking, as we go to walking. We say to ourselves "what do we do with these fruits, do we make jam, do we dry them? ": It's a bit like that.

Yâd [2013] is a little different, it's war. But war without the American thing where there are explosions everywhere without a drop of blood. On the contrary, it’s empty landscapes. There is not anybody. They are all dead. It looks like something could happen, but no, nothing. It’s a way of saying that all wars are a little alike. Throughout the film, we talk about the buildings that we built on the corpses and cemeteries that were overturned by bombs. At the place of this old cemetery, which was bombed, where the children were playing and where the explosions and the skeletons came out of the ground, and where the people also died, and which became a battlefield, what do we see it now? Well now they're building buildings there. We see a crane on a mountain landscape, with sounds of construction site. Yâd therefore talks about erasing traces ...

 

Emmanuel

Unlike digital, the image produced in photochemical is really an impression. It's like in Gutenberg's time: you have a surface, a material on which you print an image. Once the film exists, you can grab the film with your bare hands, look through the transparency and see your image. This is something that is completely impossible with a DCP or a digital file, this dematerialization which makes it not tangible. Precisely, since you can grasp it, you can also intervene on it with your bare hand, you can scratch on it, etc. I remember this anecdote from Godard, who needed to have a slightly more dirty rendering of an image in one of his films, so he put his negative on the ground and stepped on it. Well, it’s a gesture he’s taken from some experimental filmmakers, it was almost flirtatious on his part to do something like that. But it’s the idea of ​​having a direct impact between the filmmaker’s body and the image of his film. There is this kind of intimate relationship that is created. Since the film deals with perception, and even with the ecological question - of the planet, of the imprint that we leave on things, etc. - it would seem completely contradictory to me to do that digitally. I don’t see how I could talk about it in a relevant way other than on film.

 

Ci-dessous :  

PAGES LIGHT CONE ET C.J.C ( Collectif Jeune Cinéma) DE : Frédérique MENANT, Emmanuel LEFRANT, Mahine ROUHI & Olivier FOUCHARD :

 

Collectif Jeune Cinéma

Frédérique Menant est membre de l'Etna, atelier de cinéma expérimental, et de l'Abominable. Elle développe un travail de recherche en argentique depuis plusieurs années. Le corps, son image, sa présence, sont au cœur de sa recherche. Frédérique Menant is a member of l'Etna and l'Abominable, two experimental film laboratories.

http://www.cjcinema.org

 

Emmanuel LEFRANT

Nationality: french Emmanuel Lefrant lives and works in Paris, where he makes films, all self-produced, exclusively on celluloid. The films lie on the idea of representing, of revealing an invisible world ( the secret forms of emulsion), a nature that one does not see.

https://lightcone.org

 

Olivier FOUCHARD

Images (1) Links (2) Agenda (0) (1969- ) Nationality: french Reside and work in RIVES (FRANCE). A graduate of the Beaux-Arts in Grenoble, Olivier Fouchard, an artist since always and Trameur-Peintre (since 1986) has produced and produced since the mid-90s a remarkable number of films and videos.

https://lightcone.org
Collectif Jeune Cinéma

Diplômé des Beaux-Arts de Grenoble, Olivier Fouchard a produit et réalisé depuis le millieu des années 90 un nombre remarquable de films et vidéos. Tel un alchimiste, il maîtrise, grâce aux techniques artisanales de laboratoire, la plupart des étapes de fabrication des films argentiques.

http://www.cjcinema.org

 

REVUE DÉBORDEMENT : 

PAGE fb : https://www.facebook.com/revue.debordements

Revue Débordements

Revue Débordements. 6,075 likes · 126 talking about this. Revue en ligne de cinéma.

https://www.facebook.com

 

Débordements: Critique et Recherche

Débordements est une revue en ligne de cinéma (critique / recherche)

http://www.debordements.fr

 

 

Mahine Rouhi & Lesfilms Delafure aiment le :
Nouveau numéro papier de l'excellente Revue Débordements consacré aux liens entre cinéma et écologie :

Débordements N°2 : Terrestres, après tout

Débordements n°2 : Terrestres, après toutComment sortir de l'écartèlement entre les prédictions catastrophistes et les dénis fervents? Comment inventer des manières de vivre qui soient en même temps des façons de perdurer? Voilà quelques-uns des chantiers qu'ouvre aujourd'hui la question écologique, et auquel le cinéma contribue à sa façon. Comment?

https://www.helloasso.com

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Débordements N°2 : Terrestres, après tout

Débordements n°2 : Terrestres, après toutComment sortir de l'écartèlement entre les prédictions catastrophistes et les dénis fervents? Comment inventer des manières de vivre qui soient en même temps des façons de perdurer? Voilà quelques-uns des chantiers qu'ouvre aujourd'hui la question écologique, et auquel le cinéma contribue à sa façon. Comment?

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Raphaël Nieuwjaer : une revue de cinéma, du web au papier

Raphaël Nieuwjaer est membre de la revue de cinéma en ligne Débordements. Il nous en parle, ainsi que du futur premier numéro papier, en cours de préparation ! Depuis 2012, Raphaël Nieuwjaer s'occupe avec quelques camarades de la revue de cinéma en ligne (critique / recherche / traduction).

https://www.franceculture.fr

 

Débordements N°1 : David Simon et filmer l'espace public, et Débordements N°2 : Terrestres, après tout

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Débordements N°2 : Terrestres, après tout - Débordements
Financer la réalisation et l'impression du deuxième numéro de la revue Débordements
Débordements n°2 : Terrestres, après tout

Comment sortir de l’écartèlement entre les prédictions catastrophistes et les dénis fervents ? Comment inventer des manières de vivre qui soient en même temps des façons de perdurer ? Voilà quelques-uns des chantiers qu'ouvre aujourd'hui la question écologique, et auquel le cinéma contribue à sa façon. Comment ? D'abord en constatant, en pointant. En faisant affleurer, d’une part, les traces d’un délabrement terrible dans sa patience même. D’autre part, en exposant la palette des réactions et propositions qui ne cessent de croître suite à ce qu’il faut bien appeler une prise de conscience. De ce point de vue, tous les cinémas peuvent être convoqués, depuis les blockbusters qui déclinent les scénarios de la fin du monde tout en maintenant leur idéal esthétique et économique de dépense somptuaire, jusqu'aux documentaires désargentés relevant ici ou là l’avancée du désert et l’implantation des oasis. On le comprend, interroger le cinéma à l’aune de l’écologie est un projet aussi vaste que flou. Un projet n’admettant que des réponses partielles, et qui trouve après une série d'entretiens publiés sur Débordements (avec Elise Domenach, Jean-Baptiste Fressoz et Hervé Aubron) un développement dans ce second numéro papier : Terrestres, après tout.

Celui-ci s’ouvrira sur un entretien-fleuve mené par Romain Lefebvre et Florent Le Demazel avec Dominique Marchais, le réalisateur du Temps des Grâces ou de Nul homme n’est une île. Traitant d’agriculture, d’un réseau hydrographique ou encore d’expériences collectives soucieuses de penser l'avenir en accord avec le milieu, ses films sont spontanément associés à l’écologie. Mais ce sont des liens plus complexes qui se révèlent au fil de l’échange : revenant sur son travail de recherche et de réflexion ainsi que sur les étapes du tournage et du montage (la recherche du point de vue adéquat, le souci de mêler les échelles et de donner à voir les relations), le cinéaste témoigne ici d’une conception de l’écologie qui consiste avant tout à ne jamais séparer la question de la nature des dimensions politiques et économiques qui en informent l’usage. Si le nom de David Simon s'est glissé dans la discussion, comme pour offrir une douce transition d’un numéro à l’autre, nous n’en serons pas tenus pour responsables.

Les liens entre cinéma et écologie seront ensuite explorés au fil d'une collection d’essais, réflexions singulières autour d’un mouvement cinématographique (les avant-gardes des années 1920), de la démarche d’un·e cinéaste (Kelly Reichardt, James Cameron…) ou d’une thématique transversale (les animaux, les déchets). Les enjeux écologiques tels qu’ils nous apparaissent aujourd’hui peuvent-ils seulement être figurés ? C’est, en sous-main peut-être, la question des relations que nous entretenons avec la nature qui doit se poser. Elles incluent nos représentations de la nature environnante, les transformations que nous lui infligeons à l’ère de l’Anthropocène (ou capitalocène, plantationocène ou chtullucène, selon le dénominatif qu’on lui donnera au fil de ce numéro) ; il y a aussi, en retour, les façons dont la nature nous apparaît, se fait sentir à nous, ne serait-ce qu’à partir de nos corps, notre substance d’êtres terrestres qui lui appartient toujours.

(Avec des contributions de Hervé Aubron, Gabriel Bortzmeyer, Jérémie Brugidou, Olivier Cheval, Jean-Michel Durafour, Jeanne-Bathilde Lacourt, Alice Leroy, Raphaël Nieuwjaer et Jean-Marie Samocki.)

Enfin, une « conversation potentielle » menée par Charlie Hewison entre Emmanuel Lefrant, Frédérique Menant, Olivier Fouchard et Mahine Rouhi permettra d'envisager une écologie des pratiques cinématographiques expérimentales. Ces cinéastes travaillent en argentique et hors de l’industrie, en s'organisant en collectifs ou en laboratoires d’artistes. Ils élaborent ainsi des techniques de développement moins polluantes tout en se réappropriant les moyens de production. À travers leurs démarches laissant le climat, la terre et les éléments agir à la surface même de la pellicule, s’inventent de nouveaux rapports entre le film et le paysage, au-delà de toute question de représentation.

Débordements n°2 : Terrestres, après tout comprendra environ 220 pages, avec des illustrations. Sa parution est prévue pour septembre 2020.

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